Sylvain Dubuisson

Enseignant.e de 1988 à n/a

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Enseignant en design à l’école Camondo en 1988

Sylvain Dubuisson

 

Article signé Constance Rubini pour l’Encyclopedia Universalis :

Architecte et designer, Sylvain Dubuisson est né à Bordeaux le 20 février 1946, au sein d’une famille d’architectes de renom : il est le petit-fils d’Émile Dubuisson, auteur du beffroi de Lille, et le fils de Jean Dubuisson qui a notamment collaboré, à Paris, à la réalisation du quartier Maine-Montparnasse (1958-1966) ainsi qu’à la construction du Musée national des arts et traditions populaires (1959-1969).

Diplômé en 1973 de l’École supérieure d’architecture de Saint-Luc de Tournai, en Belgique, Sylvain Dubuisson s’installe indépendamment, dès 1980.

Face à la génération des designers qui émerge alors et qui puise dans la culture de la rue et de la bande dessinée les fondements d’un design expressif, souvent ludique et chargé d’un grand pouvoir de communication, Dubuisson se singularise par une culture très personnelle, qui mêle des connaissances classiques et surtout littéraires à une curiosité pour les sciences et à une fascination pour les technologies de pointe.

Son perfectionnisme le porte à faire le tour des usines et des fabricants, à réfléchir sans cesse sur la tolérance des nouveaux matériaux, sur la géométrie exacte du tracé et la juste proportion des formes.

Ses premières œuvres sont les « objets psychotiques », faits d’un arrangement d’éléments hétéroclites, comme la lampe Beaucoup de bruit pour rien (1984, coll. du Fonds national d’art contemporain, déposée au musée des Arts décoratifs à Paris). Dubuisson les nomme ainsi car ils appartiennent à une période de son activité où, par volonté d’affirmer sa propre vision du design, il autofinance ses créations, qui demeurent pour la plupart au stade de prototype.

Il s’interroge par la suite sur l’essence des objets. Comment une pendule, par exemple, peut-elle à la fois donner l’heure et transmettre la notion du temps. Son horloge circulaire T2/A3 (1986, coll. Centre Georges-Pompidou, Paris) est fixée sur une règle graduée ; elle indique l’heure, les minutes et les secondes par un jeu de diodes électriques respectivement vertes, rouges et jaunes.

À une époque où il lui semble que la fonctionnalité des objets ne peut plus être un enjeu primordial, Dubuisson s’attache avant tout à l’expression d’un discours qui donnerait une réalité aux objets.

A commencer par leur dénomination qu’il charge de sens, telle que Suite ingénue, nom du fauteuil réalisé, en 1991, pour le bureau du ministre de la Culture, Jack Lang, dont les pieds creux, façonnés avec un fil torsadé, renferment chacun des objets différents : un « coup de dés », un serpent, un artichaut ou une reproduction de la Vénus de Milo.

Il a également recours à la citation. Ainsi, il grave au laser le poème de René Char Lettera Amorosa, sur un tube en titane ajouré qui soutient le corps d’un vase en verre soufflé. Celui-ci se termine par une large corolle destinée à recueillir les pétales, le bouquet offert dure ainsi un instant de plus. Le titane employé ici est un matériau utilisé dans les avions par exemple.

Dubuisson est, en effet, curieux des matériaux contemporains les plus sophistiqués, utilisés dans des domaines extérieurs au design ; il aime en étudier les possibles implications domestiques. Sa Table composite (1987), dont la forme est volontairement archétypale, est réalisée à base de fibre de carbone imprégnée de résine. Son extrême légèreté n’apporte pas d’amélioration quant à sa fonctionnalité, mais, en revanche, l’idée d’apesanteur qu’elle suggère ajoute une poésie à l’objet. Il y a, en effet, un certain romantisme à apporter la technicité d’une navette spatiale dans une salle à manger…

L’année 1989 marque un tournant dans sa carrière : le musée des Arts décoratifs, à Paris, lui consacre une exposition rétrospective. Les objets présentés, qui sont souvent le résultat de savants calculs mathématiques, sont également porteurs d’une dimension littéraire. Comme un roman, ils invitent au rêve et au voyage. Cette exposition révèle Sylvain Dubuisson au public, et la presse, séduite, le présente comme un designer atypique et brillant.

Dès lors, il est commandité par l’État à diverses reprises, par la Manufacture de Sèvres, le musée de la Tapisserie à Aubusson et par le ministère de la Culture.

En 1990, il reçoit le grand prix de la création industrielle. Ses activités se diversifient.

En 1993, il est sollicité pour le commissariat de l’exposition Design, miroir du siècle, au Grand Palais, puis, en 1996, pour la mise en scène de l’exposition La Magie des plastiques à l’École des beaux-arts de Paris.

Il aménage de nombreux lieux publics dédiés à la culture, tel l’espace d’accueil situé dans la tour nord de Notre-Dame de Paris, en 1986, ou encore l’espace d’accueil et la conservation du Musée historique des tissus à Lyon, en 1988.

Dubuisson réalise également plusieurs librairies Flammarion, dont la librairie La Hune, à Paris, en 1991.

En 1996, il achève son premier bâtiment, les chais de Haut-Selve, au cœur des vignes des Graves au sud-est de Bordeaux.

Il réalise la scénographie de l’atrium et l’aménagement des salons de la présidence française au Parlement européen à Bruxelles en 2008 et réaménage le grand vestibule et l’espace détente de la bibliothèque Sainte-Geneviève à Paris en 2011.

La variété de ses réalisations, en France ou à l’étranger, confirme sa polyvalence. Parmi ses réalisations, la bouteille-coffret pour Château Talbot, la collection d’objets de table en porcelaine SD One qu’il a dessinée pour Guy Degrenne (le mug pour enfants Dombo, 2002 ; la tasse à café Anno, 2008 ; la chaise NM, 2010) montrent une sobriété, qui, loin de certaines de ses créations plus loquaces, illustre la richesse et la diversité de son travail.

En 2006, le musée des arts décoratifs de Bordeaux, sa ville natale, a organisé La Face cachée de l’utile, une rétrospective des quarante ans de créations du désigner et de ses recherches sur les nouveaux matériaux et les objets assistés par ordinateurs.

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