L’article de la semaine #039

Les Barbapapas témoignent d'une époque où l'on rêvait de logements écolos tandis que la construction de grands ensembles explosait.

Publié par Bertrand Ehrhart12 décembre 2022

Annette Tison et Tanus Taylor publient le premier album des Barbapapas en 1970.

La chaîne YouTube de géographie Archipel propose, en moins de 9 minutes, avec La leçon d’urbanisme des Barbapapas, de montrer combien les Barbapapas reflètent une époque, en Europe occidentale, à la fois d’utopie post soixante huitarde, versus les grands ensembles, où les architectes participent de deux projets de société contradictoires, voire antinomiques.

Avec les Barbapapas et leurs difficultés à se loger, plusieurs questions sont posées:

  • Pourquoi les grands ensembles concentrent-ils pauvreté et violence, tandis qu’il y a 50 ans, on en faisait des cartes postales ?
  • Pourquoi nos villes accordent-elles tant de place à la voiture ?
  • Pourquoi a-t-on failli raser la rive droite de Paris ?
  • Pourquoi toutes ces zones commerciales autour des villes ?

La géographie, l’urbanisme et l’architecture sont souvent présents dans les albums pour enfants, Christophe Meunier en témoigne dans l’article La maison de Barbapapa, Poutchy-Blue et les autres… la géographie des espaces domestiques dans les albums pour enfants, cité par Archipel, ainsi que de nombreuses sources en lien avec la vidéo, comme l’article signé Raphaële Bertho, paru dans la revue Etudes photographiques numéro 31, printemps 2014 Les grands ensembles. Cinquante ans d’une politique-fiction française.

Les Barbapapas nous rappellent la crise du logement dans années 1950 et la reconstruction, lorsqu’à relire les premiers albums, on vérifie qu’il sont d’abord en recherche de logement, qu’ils s’essaient à squatter (image en Une), qu’on les expulse pour les reloger bien serrés dans un logement social de grand ensemble loin du centre-ville.

Les Barbapapas naviguent dans les eaux de la ségrégation socio-spatiale, de la politique de la ville et de ses aléas, voient s’ériger les ZUP, et finissent par trouver leur bonheur dans… l’habitat individuel.

Pas n’importe quelle maison individuelle. Annette Tison, architecte de formation, semble fascinée par les propositions d’Anti Lovag et par les bulles d’Häusermann.

L’utopie des grands ensembles versus celle de l’habitat individuel proche d’une certaine nature, les Barbapapas sont cools, ils sont babacools.

Même si l’on a pu voir un succès renouvelé, mais à la marge, de la maison de campagne, avec la crise du Covid, la démographie mondiale galopante, et le dérèglement climatique, font que cet idéal de la maison bulle n’apparaît plus exactement comme la panacée pour un projet d’urbanisme durable.

D’autant que, sauf erreur de notre part, la régulation du logement, c’est-à-dire sa dérégulation, par le marché immobilier, s’est largement substituée à la politique du logement depuis un bon bout de temps.

Lisez les premiers albums des Barbapapas, ça vous fera du bien de lire un petit peu, et réviser votre histoire de l’architecture du logement, en France, depuis l’appel de l’abbé Pierre en 1954, jusqu’à l’apparition du ministère de la ville, en 1990, qui se substitue à celui de l’équipement, pour la construction.

Hup hup hup barbatruc (joyeux Noël)

Dans la même thématique

Partager cette page sur :

Le lien a bien été copié !